Rien de tel que 14h d'escale à
Mexico City pour donner des nouvelles et mettre en ligne notre dernier article
! Jusque là, quoi de plus normal, les petits galopères sont toujours sur le
territoire mexicain. Mais pourquoi ont-ils troqué leur Toyota HJ61 contre un
Boeing 787-8 ? Là, vous pouvez davantage vous poser de questions. Et bien, ce
n'était pas prévu au programme et le moi de mai n'est pas une période propice
pour faire un poisson d'avril... Chose impensable il y a quelques jours, c'est
aujourd'hui bien réel, nous rentrons en France ! Il serait d'ailleurs plus
juste de dire que nous ne rentrons pas mais que nous allons y passer un peu
plus de 3 semaines, en vacances quoi ! Mais franchement, ce
n'est pas très logique de fêter nos deux ans de voyage sur les routes
américaines... En France ! Heureusement, nous avons notre billet retour pour la
Paz, en Basse-Californie du Sud.

Direction la France !
Vous avez compris, nous l'avons un
peu amer et en même temps, cela marque la fin de galères financières que nous avons
depuis plus de 14 mois. Depuis mars 2015, notre banque était
"victime" d'une investigation américaine pour des suspicions de
blanchiment d'argent. Et oui, ayant regard sur toutes les affaires du monde,
ils ont le pouvoir d'engager une enquête qui aura duré plus d'un an mais qui
surtout aura obligé tous les clients de la banque à ne pas compter sur leurs
économies... Comme tous les clients, nous n'avons pas eu accès à notre
argent pendant cette période. Depuis, l'instance américaine a retiré ses accusations,
une nouvelle banque a été créée pour recueillir les comptes "sains"
des clients dont nous faisons partie bien sûr ! Ne commencez pas à croire que
nous avons quelque chose à voir avec l'argent blanchi en provenance du
Venezuela ou de la Mafia chinoise et russe !
Riches de milliards d'étoiles !
C'est donc pour signer des papiers
que nous faisons ce petit aller-retour Mexique/France, étape indispensable pour
retrouver un accès normal à nos euros, enfin ! Jusqu'à maintenant, nous avons
réussi à bien nous débrouiller tout en nous serrant la ceinture mais nous
commençons à ne plus pouvoir y faire de trous supplémentaires pour serrer plus
fort ! Le fruit de notre travail canadien, les dollars américains de secours
planqués dans la voiture depuis le départ de France, la vente de la tente de
toit gagnée grâce à vos votes lors du Photo Contest et enfin le cadeau du
centre des impôts canadiens nous ont permis de vivre modestement durant ces 14
mois de banqueroute. Nous sommes contents que cela se termine et finalement,
nous sommes contents à l'idée de revoir pas mal de monde en France que nous ne
pensions pas voir avant quelques années encore !
Nous quittons donc quelques temps la
Basse-Californie du Sud, avec un pincement au cœur, pour mieux la retrouver
dans un peu moins d'un mois ! Alors que notre avion décolle, le soleil se lève
tout juste sur la Baja et nous regardons s'éloigner La Paz qui s'éveille de sa
fraîche nuit. Une personne nous demandait récemment où nous vivions,
s'attendant à ce que nous lui disions d'où nous venions, en France... Nous lui
avons répondu spontanément que notre maison, c'est notre voiture et
bizarrement, nous nous sentons à la maison là où elle se trouve. Nous laissons
donc notre chez-nous au Mexique et c'est bien là que nous nous sentons bien, comme nous
l'étions au Canada, puis aux États-Unis. Nous aimons nous dire qu'en ce moment,
notre jardin est un jardin de cactus centenaires où scorpions et serpents
aiment se promener la nuit, quand les températures fraîches font fuir les
lézards. Ceux-là, ils préfèrent les journées ensoleillées qui atteignent en ce
moment les 35°C.

Petite visite curieuse du matin
Nous ne sommes pas encore reptiles
et souffrons parfois un peu de cette chaleur qui nous abat lorsque le soleil
est au zénith. Nous avons face à nous un choix des plus difficiles... Nous
plonger dans l'eau ou prendre la voiture, ouvrir les fenêtres en grand et
rouler à 90km/h nous fait l'effet d'un air climatisé. Ah !!! De l'air !!! Nous
nous exclamons en cœur en empruntant l'une des nombreuses pistes qui traversent
la Basse-Californie dans sa largeur. Nous quittons les côtes de la Mer de
Cortez et la piste grimpe doucement à travers la Sierra.

D'air et de poussière au cœur de la Sierra de la Giganta
Dans les montagnes,
les missionnaires se sont installés il y a plus de 300 ans là où le désert
dévoile ses trésors phréatiques. Telle un oasis, la Mission San Francisco
Javier est une des plus belles du Mexique. Les jésuites y ont construit tout un
réseau d'irrigation qui leur a permis de produire de nouveaux trésors de vie.
Les orangers et les oliviers ont pris racine dans la Sierra, au milieu de
champs de maïs et de vignes à l'origine des premiers vins californiens. Quand
on quitte la Mission, le désert n'est plus peuplé que de troupeaux de chèvres
qui se régalent d’arbustes aussi piquants que les piments mexicains ! Au milieu
d'elles, seul un chien veille à leur sécurité comme s'il était l'une d'entre
elles.
Mission San Francisco Javier, petit paradis au cœur de la Sierra
Alors que la piste redescend vers
les plaines et l'Océan Pacifique à l'Ouest, nous arrivons dans un nouvel oasis.
Les hommes vivent cette fois au pied des palmiers et d'énormes manguiers qui
croulent sous des tonnes de mangues en cours de maturation. Ainsi nous
découvrons où pousse ce qui fait la base de notre petit déjeuner mexicain !
Alors que nous sommes bien arrivés en France, nombreux sont ceux qui nous
demandent ce dont quoi nous avons manqué depuis que nous sommes partis il y a
deux ans... Comment vous dire qu'un petit déjeuner de mangues et de crêpes à la
cajeta (confiture de lait de chèvre) ne nous fait pas regretter grand
chose ! Il paraît que "pour bien aimer un pays, il faut le manger, le boire
et l'entendre chanter" (Michel Déon). Nous avons le sentiment que notre
vie, nous la croquons à pleines dents ! Nous nous délectons de fruits en masse,
ce qui nous vaut de nous lever plusieurs fois par nuit pour veiller à
l'arrosage des cactus de notre jardin.

Les frégates superbes partagent leur jardin avec nous !
Jour après jour, chaque instant de
vie nourrit notre curiosité et notre plaisir de découvrir. Il est difficile de
ne pas devenir épicurien au Mexique, en particulier lorsque nous regagnons les
côtes de la Mer de Cortez. Alors que nous prenons garde à peu dépenser nos
pesos, nous n'avons pas besoin de grand chose et nous devenons riches de petits
moments si ordinaires ici. Par exemple, le spectacle de la vie de la faune
locale est incroyable dès lors que nous y prêtons attention à ce qui se vit juste
à côté de nous. Les pélicans nous fascinent, formidables et lourds engins
volant tels des B52 en formation. Et puis d'un coup, les oiseaux majestueux
deviennent des acrobates maladroits. Ils piquent une tête dans l'eau et d'un
coup de bec, se ratatinent à la surface. Un gros loupé dans l'amerrissage ? Non,
c'est juste l'heure de la pêche !

"Nage" synchronisée dans le ciel mexicain
Dans le grand cirque de la Mer de
Cortez, c'est ensuite aux raies de faire leur entrée ! Elles s'élancent au
dessus de l'eau comme si elles avaient pris l'élan du fin fond des profondeurs
turquoises de la mer. Elles battent des ailes, gracieuses et silencieuses,
essayant de gagner l'altitude, peut être les étoiles mêmes ! Puis c'est la
chute fracassante et elles s'éclatent sur l'eau de toute leur largeur. Ce n'est
pas un concours de vol en fait, c'est un grand concours de plats ! Tout en
fermant les yeux, en position horizontale dans la tente de toit, nous nous
laissons bercer par leurs "splash" lointains avant que ne débute le
concert des animaux nocturnes... Nous comprenons si bien pourquoi le Commandant
Cousteau a nommé la Mer de Cortez "l'Aquarium du Monde". Mais pas
besoin du masque et du tuba pour se rendre compte que le spectacle est aussi
bien dans les eaux turquoises qu'au dessus !

Cousine de la raie Manta, la raie Mobula, ce "diable de mer" peut faire jusqu'à 5m d'envergure !
Jour après jour, c'est aussi des
rencontres que nous nous "nourrissons". Ne vous inquiétez pas, nous
ne croquons toujours pas les jambons des mexicains ! C'est toujours avec un
grand plaisir que nous vivons des échanges avec eux et bien souvent, le pur
hasard crée une situation qui nous met en bonne relation. C'est par exemple
trouver un jeune planté dans le sable avec sa voiture et qui n'arrive plus à en
sortir. Matthieu et Jeanne dégonflent les pneus de leur camion pour s'en
rapprocher, nous attrapons les sangles, les pelles, puis dégonflons ses pneus à
notre tour... Pour le sortir de la situation comme une fleur ! Tout content
d'être tiré de là, il court attraper dans son coffre papaye, piments et bières
qu'il nous offre tellement reconnaissant. Nous apprendrons plus tard qu'un
mexicain ne va pas forcément demander d'aide à un autre mexicain... C'est le
risque de découvrir après le coup de main qu'il s'est servi au passage dans ses
biens ! Ils se méfient les uns des autres, en particulier depuis que les petits
cartels ont été évincés de la grande course aux pesos de la drogue pour se
mettre au racket des mexicains au quotidien...
Notre espagnol progresse, je
retrouve les bases de l'apprentissage de cette première langue à l'école. Je me
dis souvent que mes profs d'espagnol, la plupart alcooliques, n'ont pas si mal
fait leur boulot en fait ! Alex a plus de mal à se battre contre les mots
italiens qui s'imposent à lui lorsque nous avons l'occasion de nous exprimer.
Malgré la frustration de ne pas pouvoir dire tout ce que nous aimerions dire,
de ne pas pouvoir communiquer spontanément, il existe toutefois des sujets de
conversation qui permettent tout de suite de fendre la glace ! Le meilleur,
c'est le piment ! Nous commençons par demander une recette pour apprendre à les
préparer. Puis c'est l'heure du fou rire partagé quand on aborde la question de
l'après-piment et de ses trois effets bien localisés ! Enfin, mise en pratique,
la dégustation ! Les tabous sont tombés, la porte est maintenant ouverte à une
multitude de nouveaux sujets. Il n'y alors que le soleil qui peut nous arrêter
dans la discussion. À 40°C, en plein soleil, nos voisins de plage, Andres,
Veronica, et leurs enfants s'excusent d'avoir à se retirer pour savourer leur
sieste, chose qui est devenue aussi pour nous une institution dans notre
quotidien !

Ce soir, nous mangeons "picante"
Une fois arrivés à La Paz, c'est
Jean-Christophe et Marjorie qui nous accueillent dans leur paradis sauvage au
ranch de Cactimar. Mis en relation avec eux par le rédacteur en chef de Mondial
4x4, nous sommes invités à venir partager una cerveza et una limonada. Alors que
nous fêtons le 26 mai nos deux ans de voyage, ils fêtent ce même jour leur 10
ans en Basse-Californie. Mexcapade est le fruit de leur amour pour cette région
du Mexique qu'ils aiment faire partager. C'est un régal de passer du temps avec
eux et d'apprendre de leur longue expérience en Baja. Nous rencontrons aussi
Cathy et Olivier, devenus résidents du Mexique il y a plusieurs années. Après
avoir vécu en France, s'installer en Baja s'est imposé pour eux comme une
évidence. Nous comprenons si bien leur choix et chaque jour qui passe conforte
notre propre choix de nous établir ailleurs. Nous savons depuis le départ que
nous ne rentrerons pas vivre en France. Aujourd'hui, après deux ans de vie en
Amérique du Nord, nous aimons dire que nous sommes en prospection...

Un jour, ce sera notre tour de trouver notre petit nid !
Mais pour le moment, le temps est
celui du marathon des retrouvailles ! Plus nous revoyons nos amis, plus nous
apprécions notre séjour en France. C'est bon de vous revoir ! Mais malgré tout,
il nous tarde de retrouver notre chez nous et pour l'instant, il nous
attend au Mexique !
A très bientôt,
Les Galopères.